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    4 hours ago

    Je ne pense pas qu’il faille prendre le vocabulaire de l’homosexualité comme exemple, puisque là ce sont en effet des étiquettes mais qui ont été imposées par la majorité oppressive envers une minorité qui n’avait rien demandé et qui n’avait pas particulièrement demandée à être étiquetée.

    Je crois en cette hypothèse qui doit probablement avoir un nom que j’ignore en linguistique, qui est qu’on est capable de former des concepts seulement un niveau au-delà de notre vocabulaire, et que pour aller plus loin, on doit se faire des mots comme un marchepied. Par exemple, si t’as pas les mots pour définir toutes les tendances LGBT, si t’as que un seul mot comme gay pour représenter tout ce qui n’est pas l’hétéronormalité, tu vas pouvoir expliquer ce que c’est que d’être bi, d’être trans, d’être queer, d’être bicurieux. mais tu auras beaucoup de mal à dépasser ça. Avec ce vocabulaire, tu peux par exemple expliquer qu’il y a un spectre, qu’il y a peut-être plusieurs axes, voire que certaines catégories n’ont rien à faire là-dedans, que la transsexualité et l’homosexualité n’ont rien à voir (me tapez pas, c’est un exemple) mais c’est des choses qui leur a été très difficile d’exprimer sans avoir le vocabulaire.

    Et pour en revenir au groupe, ce qui m’intéresse beaucoup c’est ce que tu appelles la culture du groupe. J’ai l’impression qu’on a autant de mal à la décrire que si on n’avait pas le droit d’utiliser des adjectifs de personnalité pour décrire des personnes. Je peux utiliser des périphrases pour dire qu’une personne est colérique ou qu’elle est timide, mais c’est laborieux.

    Avoir un mot pour dire que ce groupe-là a tendance à trop faire de réunions, ou que ce groupe-là, sans être complètement sectaire, a pas spécialement envie d’accueillir plein de membres, que tel autre groupe n’a pas du tout envie de gérer un compte bancaire et de l’argent et préfère fonctionner en mode bénévole à pur et que tel autre a peut-être potentiellement l’intention de devenir un jour une entreprise, ça peut être intéressant.

    Et c’est peut-être fondamental, parce que si mon hypothèse est correcte, sans ces mots, on va avoir beaucoup de mal à penser la collaboration entre groupes, voire même la création de groupes dont il y a besoin d’une façon un peu plus agile. Tu le dirais au sein d’une équipe: “Je ne peux pas aller en réunion avec machin parce qu’il est trop timide, il ne va pas oser prendre la parole. Donc c’est moi qui devais devoir parler”. “Je ne peux pas y aller avec un tel parce qu’il est beaucoup trop agressif.”

    On a besoin de pouvoir dire des choses similaires sur les groupes pour savoir s’ils peuvent travailler ensemble, si une personne donnée peut en faire partie, comment on doit résoudre des problèmes en leur sein, les aider, etc.

    (Et il se peut aussi que je sois juste en train de réfléchir à ce que je pourrais écrire d’intéressant dans une fanfiction sur le cycle de la Culture de Iain Banks.)